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Pédophilie : nous, Scouts et Guides de France, demandons aux évêques...8 oct. 18

Tribune dans La Croix du 8 octobre 2018

Pédophilie: nous, Scouts et Guides de France, demandons aux évêques...

 

MARIE MULLET-ABRASSART, PRÉSIDENTE DES SCOUTS ET GUIDES DE FRANCE

 OLIVIER MATHIEU, DÉLÉGUÉ GÉNÉRAL DES SCOUTS ET GUIDES DE FRANCE

 

Chili, États-Unis, Allemagne : les scandales liés à l’Église se succèdent et la France n’est pas épargnée. Il nous faut lever toutes les interrogations et, par une intervention extérieure et indépendante, mettre d’urgence au jour tout le mal qui été commis. Les Scouts et Guides de France sont prêts à participer à cette démarche.

Au-delà de la gravité des faits, nous blessent aussi le silence et la complaisance insupportables qui viennent d’une Église qui porte le souci des plus faibles. Il n’est plus aujourd’hui le temps de la repentance, plus seulement le temps indispensable de la prière. Le pape François a envoyé un courrier inédit à l’ensemble des catholiques du monde, un appel à l’aide dont on peine encore à percevoir l’envergure, comme n’avait pas été comprise à sa juste valeur sa charge contre les « quinze maladies de la Curie » il y a quatre ans. Nous souhaitons prendre toute notre place dans cette conversion à laquelle son appel nous invite, appel renouvelé par la Conférence des évêques de France en septembre. Si nous ne nous engageons pas « dans la transformation ecclésiale et sociale dont nous avons tant besoin », alors tous les efforts pour lutter contre la pédocriminalité seront vains. Nous n’éradiquerons pas le Mal, mais nous pouvons changer la culture qui le favorise.

Bien loin d’opposer clercs et laïcs, le cléricalisme menace chaque catholique. « La masse des catholiques que nous voyons à la messe chaque dimanche ne désire, au fond, savoir de la religion que ce qui peut les confirmer dans la bonne opinion qu’ils ont d’eux-mêmes », écrivait Bernanos. Sommes-nous cette « masse » ou suivons-nous le Christ ? « J’avais faim et vous m’avez donné à manger ; j’avais soif et vous m’avez donné à boire ; j’étais un étranger et vous m’avez accueilli ; j’étais nu et vous m’avez habillé ; j’étais malade et vous m’avez visité ; j’étais en prison et vous êtes venus jusqu’à moi. » Chacun peut discerner sur cette question ; mais collectivement, nous voulons changer l’Église pour rendre plus visible sa beauté. Nous voulons rentrer en résistance contre le repli identitaire, contre toute forme d’arrogance. Nous savons l’immense trésor de la foi reçue de l’Église, que nous voulons passer après nous avec le témoignage de ces chrétiens nombreux et anonymes qui donnent une part de leur vie.

Le scoutisme est un cheminement qui continue à nourrir l’élan missionnaire dont nous avons besoin. Mais les centaines d’aumôniers, d’accompagnateurs et accompagnatrices spirituels au sein des Scouts et Guides de France, consacrés ou non, souffrent aujourd’hui de la suspicion. Nous savons pourtant à quel point leur engagement est indispensable et porteur d’une richesse inestimable. Nous sommes en première ligne pour constater les ravages de la crise actuelle sur la jeunesse. Trop de jeunes écœurés par la focalisation sur les sujets de mœurs d’une part et les affaires d’autre part, s’en vont en silence. La jeunesse attend des chrétiens des réponses et des actes sur d’autres enjeux plus préoccupants pour l’homme et sa planète.

L’Église peut changer, elle commence à le faire : dans le fond et dans la forme, le Synode des jeunes qui vient de s’ouvrir le démontre. Nous attendons que l’Église aujourd’hui donne toute sa place aux jeunes, aux laïcs, aux femmes. Malgré toute leur bonne volonté, trop de responsables sont encore prisonniers d’une culture pyramidale. Les démarches synodales de nos frères et sœurs protestants et orthodoxes peuvent être des sources d’inspiration.

Devant l’urgence et la gravité de la situation, mais aussi devant l’Espérance que nous devons porter d’une Église intemporelle ancrée dans son temps, nous demandons à nos évêques :

– d’accepter et d’accélérer la nécessaire conversion radicale d’une Église qui doit donner toute sa place aux femmes, aux jeunes et aux laïcs, partout et à tous les niveaux y compris dans la gouvernance de l’Église de France ;

– d’organiser une première rencontre entre mouvements et l’Assemblée plénière des évêques avant le sommet sur les abus sexuels convoqué par le pape en février ;

– d’organiser un synode à l’automne 2019 qui permettrait le débat sur ces sujets et dont la mise en œuvre serait en co-responsabilité entre clercs et laïcs, femmes et hommes, dans une dimension inter-générationnelle.

Pour tout cela et pour bien plus encore, ils savent qu’ils pourront compter sur l’engagement sans faille des Scouts et Guides de France à leurs côtés.

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