Australie - Pas de raccourci pour réformer l'Eglise en crise. - LCI 3/4/2019
Cette situation d’actes honteux, profondément ancrée, remet en question le fondement de l’Église. Si elle n’est pas traitée à la hauteur de son ampleur, elle peut distiller son poison pendant des siècles.
Andrew Hamilton, Australie, 3 avril 2019
Andrew Hamilton est un rédacteur consultant de la revue “Rue Euréka”.
La condamnation du cardinal George Pell a mis en lumière la consternation et l'interrogation des catholiques face aux abus sexuels et à la dévastation de la vie des victimes et de leurs familles. Elle a mis en lumière la profondeur de la crise provoquée par les abus sexuels commis par des membres du clergé de l'Église catholique.
Un parallèle historique peut aider à l’éclairer, bien qu’il soit toujours délicat à utiliser.
Les empereurs Decius en 250 et Dioclétien en 303 persécutèrent les chrétiens en réaction aux revers militaires et au déclin des valeurs romaines.
Ils ont tenté un retour aux valeurs et aux pratiques religieuses traditionnelles en désignant les chrétiens comme une force subversive et étrangère, à l'instar des musulmans vus par certains aujourd'hui en Australie.
Ils ont d'abord pris pour cible les évêques et le clergé, puis tous les chrétiens, en leur ordonnant de remettre leurs textes et leurs coupes sacrés et d'offrir publiquement des sacrifices aux dieux romains.
Ceux qui ont refusé ont été condamnés à une amende, torturés ou tués. De nombreux chrétiens, y compris des évêques et des membres du clergé, se sont enfuis ou ont apostasié (renié leur foi en offrant publiquement des sacrifices, en remettant des livres sacrés ou en achetant des certificats d’obédience).
Là où elle était systématique, la persécution a privé l'Eglise de dirigeants de valeur et l'a chargée du poids de la honte pour tous ceux qui avaient renié leur foi. On imagine la confusion des communautés après la persécution.
Elles rassemblaient ceux qui étaient devenus aveugles, sourds ou handicapés sous la torture tout en étant restés fidèles à leur foi (les confesseurs), ceux qui étaient abattus par la mort de leurs proches, ceux qui avaient fui et revenaient, des évêques et des prêtres qui rentraient après leur fuite vers des lieux plus sûrs et voulaient reprendre leur place face au clergé qui avait été ordonné pour servir en leur absence, enfin, et de manière significative, ceux qui avaient apostasiés publiquement.
L'apostasie était une blessure qui déchirait le cœur d’une Eglise qui glorifiait le courage des martyrs en tant que signe de la présence de Dieu.
Les communautés étaient inévitablement blessées par la colère, le ressentiment, la culpabilité, la confusion et surtout la désillusion devant le fossé creusé entre la profession de foi affirmée par leurs responsables et leurs membres fidèles, et les reniements.
Les récits de l'époque affirment que la crise fut surmontée par le travail coopératif d'évêques de caractère qui résolurent ainsi les différends et préservèrent l'unité de l'Eglise.
Ils ont traité la crise d'apostasie en établissant des règles de réconciliation communes et rigoureuses avec les personnes qui avaient trahi la foi de manière plus ou moins grave. Ce fut fait par le biais de synodes locaux et régionaux.
Bien que cette réforme de la gouvernance ait constitué un exploit remarquable, on ne mesure ni la profondeur de la crise d'apostasie qui a ébranlé l'Église ni l’ampleur de la démarche de réconciliation qu'il a fallu par conséquent réaliser.
Mais elle a échoué à gérer le soupçon selon lequel les évêques étaient eux-mêmes les principaux canaux de corruption dans l'Eglise.
Cette faiblesse explique en partie pourquoi des divisions sectaires ont continué à affecter les Eglises locales à Rome, en Égypte et en Afrique.
Dans la plupart des cas, les évêques qui dirigeaient les groupes séparés ont exigé une approche de la réconciliation beaucoup plus restrictive et se sont présentés comme étant l'Eglise des martyrs.
Ils ont également souvent accusé leurs évêques rivaux d'avoir fui pendant la persécution ou d'avoir promu une vision mercantile de la foi. Les divisions se sont intensifiées lorsque les empereurs, désormais chrétiens, ont sanctionné les Eglises dissidentes.
Ces dernières pouvaient alors se vanter d’être « les persécutées qui ne persécutaient pas ». Elles s’étaient ainsi revêtues du manteau de dignité des confesseurs.
Cette point est important car les récits officiels minimisaient l’importance majeure des victimes encore vivantes de la persécution. Au début, elles étaient très honorés et les apostasiés cherchaient leur soutien pour pouvoir revenir.
Leur rôle de médiateur dans la réconciliation exprimait leur autorité morale au sein de l'Eglise et leur proximité avec Dieu. Leurs défigurations par la torture symbolisaient à la fois ce que l'on attendait des disciples de Jésus et le déshonneur d'abandonner la foi.
Les évêques réformateurs ont critiqué l'arbitraire et le manque d'homogénéité dans les avis de ces confesseurs ; ils en ont fait des figures excentriques et marginales au sein de la réforme de l’Eglise.
Cette attitude a alimenté la suspicion persistante que la faute d'apostasie n'avait pas été traitée de manière suffisamment approfondie et que les processus de réconciliation étaient superficiels.
Le parallèle entre ces événements anciens et l’Église catholique d’aujourd’hui après les abus sexuels est frappant.
Dans les deux cas, des personnes qui représentent l'Eglise ont agi en blessant des vies, détruisant la confiance dans l'Eglise et dans la présence de Dieu en son sein, brisant les relations entre ses membres.
Dans les deux cas, ces actes ont oublié les victimes dont les cicatrices physiques ou mentales étaient évidentes. Et dans chacun les institutions impliquées dans les actes de corruption ont cherché à restaurer la crédibilité et à mettre en place la réconciliation.
L’expérience de l’Eglise primitive montre que des actes honteux qui remettent en question le fondement de l’Eglise divisent profondément et que, s’ils ne sont pas traités en profondeur, leurs conséquences peuvent s’étendre comme un poison pendant des siècles.
Il s'ensuit que le premier défi de toute tentative de réforme consiste à rester concentré sur la réalité profonde des abus et à reconnaître la manière dont ils peuvent empoisonner la réforme elle-même.
Croire que vous pouvez passer à autre chose après 50 ans ou plus, a sapé la réforme de l’Église primitive et le fera de nouveau si vous tentez de le croire aujourd’hui. C'est comme si les personnes dépendantes de l'alcool croyaient pouvoir cesser de consommer de l'alcool simplement en y pensant.
Le second défi posé par l'expérience de l'Eglise primitive est de reconnaître les victimes, de les respecter en tant que gardiennes de la conscience et de les associer en tant que médiateurs de la réconciliation.
Les marginaliser en tant qu'observateurs peu crédibles dont on écoute la parole mais que l’on ignore en tant que personnes, ou croire que leur disparition va effacer le problème, a ouvert la voie à la division dans l'Eglise primitive et perpétué la blessure de l'apostasie.
Il n'y a aucune raison de croire aujourd'hui que les effets d'une négligence similaire seraient moins pernicieux.
Aujourd'hui, dans l'Église catholique, les victimes sont des personnes dont la vie a été directement ou indirectement gâchée par des abus sexuels ; faire d'eux des médiateurs de la réconciliation sera plus difficile aujourd'hui que dans l'Église primitive.
En effet les victimes avaient été persécutées par l'État et les personnes qui avaient besoin d'être réconciliées avec l'Église cherchaient leur soutien.
Aujourd’hui les victimes sont persécutées par des représentants de l'Église, et l'Église doit se réconcilier avec elles pour pouvoir se réconcilier avec elle-même.
Mettre au centre de la stratégie pastorale la réconciliation avec des personnes que vous avez blessées et souvent détruites, est un engagement courageux.
Étant donné que les dommages causés par les abus sexuels s’étendent au fil des générations, c’est un engagement à long terme qui est indispensable. L'histoire ancienne nous suggère rien de moins.
No shortcuts to reform after Church abuse crisis
A pattern of shameful actions that call into question the basis of the Church cuts very deep indeed and, if left unmet at that depth, can work its poison for centuries
Andrew Hamilton, Australia, April 3, 2019
Andrew Hamilton is consulting editor of Eureka Street.
The sentencing of Cardinal George Pell highlighted the dismay and soul-searching among Catholics at sex abuse and its devastation of the lives of victims and their families. It also brought home the depth of the crisis caused by clerical sex abuse in the Catholic Church.
Although it still challenges understanding, a historical parallel may help illuminate it.
Emperors Decius in 250 AD and Diocletian in 303 AD persecuted Christians in response to military reverses and perceived decline in Roman values.
They called for a return to traditional values and religious practices and saw Christians as a subversive and alien force, much as Muslim people are seen by some in Australia today.
They first targeted bishops and clergy, then all Christians, ordering them to hand over their sacred texts and vessels and publicly to offer sacrifice to the Roman gods.
Those who refused were fined, tortured or killed. Many Christians, including bishops and clergy, had fled or apostasised (denied their faith by publicly offering sacrifice, handing over the sacred books or buying certificates of compliance).
Where the persecution was systematically pursued, it deprived the church of strong leaders and burdened it with the shame of those who sacrificed. The disruption to congregations after the persecution can be imagined.
They included members who had been blinded, deafened or crippled while remaining faithful under torture (confessors), others grieving relatives who had been killed, some who had escaped notice, bishops and priests who had returned after flight to safer places and sought to resume their responsibilities, local clergy who had been ordained to serve in their place, and, significantly, many people who had publicly apostasised.
In a church which gloried in the courage of the martyrs as a sign of God's presence, apostasy was a corruption that tore at its heart.
The congregations were inevitably riven with anger, resentment, guilt, confusion, and above all disillusion at the gap revealed between their leaders' and members' proud profession of faith and their cowardly repudiation of it.
The standard accounts of the time held that the crisis was overcome by the cooperative work of strong bishops who had resolved disputes and preserved church unity.
They had dealt with the corruption of apostasy by establishing common rigorous rules for reconciling people who had betrayed the faith in more or less serious ways. They accomplished this through local and regional synods.
Although this reform of governance was a remarkable achievement, it ignored the depth at which apostasy had shaken the church and to which reconciliation of those who had fallen therefore needed to reach.
It also failed to deal with the suspicion that bishops themselves had been the primary channels of corruption in the church.
These weaknesses in the response explain partly why sectarian divisions continued to affect the churches in Rome, Egypt and Africa.
In most cases the bishops who led dissident groups demanded a much more restrictive approach to reconciliation and represented themselves as the church of the martyrs.
They also commonly accused their rival bishops of flight during persecution or of inheriting a tradition of selling out faith. The divisions were only intensified when the now Christian Emperors penalised the breakaway churches.
They could now boast that 'we are the persecuted who do not persecute'. They had inherited the mantle of the confessors.
This claim was significant because the traditional account minimised the crucial importance of the living victims of persecution. In the initial stages they were held in high honour, and people who had apostasised sought their patronage in order to return.
Their mediating role in reconciliation expressed their moral authority within the church and their favour with God. Their disfigurement by torture both symbolised what was expected of followers of Jesus and highlighted the disgrace in abandoning the faith.
The reforming bishops, however, criticised the arbitrariness and lack of uniformity in the confessors' judgments, and made of them eccentric and marginal figures in their church reform.
This neglect contributed to the continuing suspicion that the corruption of apostasy had not been addressed in sufficient depth and that the processes of reconciliation were superficial.
The parallels between these events and the Catholic Church today after sexual abuse are striking.
In both cases people who represented the church acted in a way that destroyed lives, destroyed trust in the church and God's presence in it, and broke relationships.
In both cases these actions left victims whose physical or mental scars were evident. And in each the institutions involved in the corrupting actions have sought to restore credibility and promote reconciliation by reform.
The experience of the early church suggests that a pattern of shameful actions that call into question the basis of the church cuts very deep indeed and, if left unmet at that depth, can work its poison for centuries.
It follows that the first challenge facing any attempted reform is to stay focused on the deep reality and corrupting effects of sexual abuse and to recognise the way in which it can poison even the attempted reform.
To believe that you can move on from it after 50 years or so undermined reform in the early church and will do so again if attempted. It is like the belief of people addicted to alcohol that they can move on from their addiction.
The second challenge posed by the experience of the early church is to recognise victims, to respect them as the keepers of conscience, and to involve them as the mediators of reconciliation.
To sideline them as unreliable observers who can be acknowledged verbally and ignored as persons, or to believe that they will fade away, opened the way for division in the early church and perpetuated the corruption of apostasy.
There is no reason to believe that the effects of similar neglect today would be less pernicious.
In the Catholic Church today the victims are people whose lives have been directly or indirectly marred by sexual abuse. To make them mediators of reconciliation is more difficult today than in the early Church.
Then the victims were those who had suffered persecution by the state, and those needing reconciliation with the Church sought them out.
Now the victims are those persecuted by representatives of the Church, and the Church that needs to be reconciled to them in order to be reconciled to itself.
To put at the centre of pastoral strategy reconciliation with people whom you have harmed, and will often want only to be shot of you, is a brave commitment.
Given that the harm done by sexual abuse has radiated out through generations, the commitment must be for the long term. History suggests that nothing less will do.
Pas de raccourci pour réformer l'Eglise en crise.
Cette situation d’actes honteux, profondément ancrée, remet en question le fondement de l’Église. Si elle n’est pas traitée à la hauteur de son ampleur, elle peut distiller son poison pendant des siècles.
Andrew Hamilton, Australie, 3 avril 2019
Andrew Hamilton est un rédacteur consultant de la revue “Rue Euréka”.
La condamnation du cardinal George Pell a mis en lumière la consternation et l'interrogation des catholiques face aux abus sexuels et à la dévastation de la vie des victimes et de leurs familles. Elle a mis en lumière la profondeur de la crise provoquée par les abus sexuels commis par des membres du clergé de l'Église catholique.
Un parallèle historique peut aider à l’éclairer, bien qu’il soit toujours délicat à utiliser.
Les empereurs Decius en 250 et Dioclétien en 303 persécutèrent les chrétiens en réaction aux revers militaires et au déclin des valeurs romaines.
Ils ont tenté un retour aux valeurs et aux pratiques religieuses traditionnelles en désignant les chrétiens comme une force subversive et étrangère, à l'instar des musulmans vus par certains aujourd'hui en Australie.
Ils ont d'abord pris pour cible les évêques et le clergé, puis tous les chrétiens, en leur ordonnant de remettre leurs textes et leurs coupes sacrés et d'offrir publiquement des sacrifices aux dieux romains.
Ceux qui ont refusé ont été condamnés à une amende, torturés ou tués. De nombreux chrétiens, y compris des évêques et des membres du clergé, se sont enfuis ou ont apostasié (renié leur foi en offrant publiquement des sacrifices, en remettant des livres sacrés ou en achetant des certificats d’obédience).
Là où elle était systématique, la persécution a privé l'Eglise de dirigeants de valeur et l'a chargée du poids de la honte pour tous ceux qui avaient renié leur foi. On imagine la confusion des communautés après la persécution.
Elles rassemblaient ceux qui étaient devenus aveugles, sourds ou handicapés sous la torture tout en étant restés fidèles à leur foi (les confesseurs), ceux qui étaient abattus par la mort de leurs proches, ceux qui avaient fui et revenaient, des évêques et des prêtres qui rentraient après leur fuite vers des lieux plus sûrs et voulaient reprendre leur place face au clergé qui avait été ordonné pour servir en leur absence, enfin, et de manière significative, ceux qui avaient apostasiés publiquement.
L'apostasie était une blessure qui déchirait le cœur d’une Eglise qui glorifiait le courage des martyrs en tant que signe de la présence de Dieu.
Les communautés étaient inévitablement blessées par la colère, le ressentiment, la culpabilité, la confusion et surtout la désillusion devant le fossé creusé entre la profession de foi affirmée par leurs responsables et leurs membres fidèles, et les reniements.
Les récits de l'époque affirment que la crise fut surmontée par le travail coopératif d'évêques de caractère qui résolurent ainsi les différends et préservèrent l'unité de l'Eglise.
Ils ont traité la crise d'apostasie en établissant des règles de réconciliation communes et rigoureuses avec les personnes qui avaient trahi la foi de manière plus ou moins grave. Ce fut fait par le biais de synodes locaux et régionaux.
Bien que cette réforme de la gouvernance ait constitué un exploit remarquable, on ne mesure ni la profondeur de la crise d'apostasie qui a ébranlé l'Église ni l’ampleur de la démarche de réconciliation qu'il a fallu par conséquent réaliser.
Mais elle a échoué à gérer le soupçon selon lequel les évêques étaient eux-mêmes les principaux canaux de corruption dans l'Eglise.
Cette faiblesse explique en partie pourquoi des divisions sectaires ont continué à affecter les Eglises locales à Rome, en Égypte et en Afrique.
Dans la plupart des cas, les évêques qui dirigeaient les groupes séparés ont exigé une approche de la réconciliation beaucoup plus restrictive et se sont présentés comme étant l'Eglise des martyrs.
Ils ont également souvent accusé leurs évêques rivaux d'avoir fui pendant la persécution ou d'avoir promu une vision mercantile de la foi. Les divisions se sont intensifiées lorsque les empereurs, désormais chrétiens, ont sanctionné les Eglises dissidentes.
Ces dernières pouvaient alors se vanter d’être « les persécutées qui ne persécutaient pas ». Elles s’étaient ainsi revêtues du manteau de dignité des confesseurs.
Cette point est important car les récits officiels minimisaient l’importance majeure des victimes encore vivantes de la persécution. Au début, elles étaient très honorés et les apostasiés cherchaient leur soutien pour pouvoir revenir.
Leur rôle de médiateur dans la réconciliation exprimait leur autorité morale au sein de l'Eglise et leur proximité avec Dieu. Leurs défigurations par la torture symbolisaient à la fois ce que l'on attendait des disciples de Jésus et le déshonneur d'abandonner la foi.
Les évêques réformateurs ont critiqué l'arbitraire et le manque d'homogénéité dans les avis de ces confesseurs ; ils en ont fait des figures excentriques et marginales au sein de la réforme de l’Eglise.
Cette attitude a alimenté la suspicion persistante que la faute d'apostasie n'avait pas été traitée de manière suffisamment approfondie et que les processus de réconciliation étaient superficiels.
Le parallèle entre ces événements anciens et l’Église catholique d’aujourd’hui après les abus sexuels est frappant.
Dans les deux cas, des personnes qui représentent l'Eglise ont agi en blessant des vies, détruisant la confiance dans l'Eglise et dans la présence de Dieu en son sein, brisant les relations entre ses membres.
Dans les deux cas, ces actes ont oublié les victimes dont les cicatrices physiques ou mentales étaient évidentes. Et dans chacun les institutions impliquées dans les actes de corruption ont cherché à restaurer la crédibilité et à mettre en place la réconciliation.
L’expérience de l’Eglise primitive montre que des actes honteux qui remettent en question le fondement de l’Eglise divisent profondément et que, s’ils ne sont pas traités en profondeur, leurs conséquences peuvent s’étendre comme un poison pendant des siècles.
Il s'ensuit que le premier défi de toute tentative de réforme consiste à rester concentré sur la réalité profonde des abus et à reconnaître la manière dont ils peuvent empoisonner la réforme elle-même.
Croire que vous pouvez passer à autre chose après 50 ans ou plus, a sapé la réforme de l’Église primitive et le fera de nouveau si vous tentez de le croire aujourd’hui. C'est comme si les personnes dépendantes de l'alcool croyaient pouvoir cesser de consommer de l'alcool simplement en y pensant.
Le second défi posé par l'expérience de l'Eglise primitive est de reconnaître les victimes, de les respecter en tant que gardiennes de la conscience et de les associer en tant que médiateurs de la réconciliation.
Les marginaliser en tant qu'observateurs peu crédibles dont on écoute la parole mais que l’on ignore en tant que personnes, ou croire que leur disparition va effacer le problème, a ouvert la voie à la division dans l'Eglise primitive et perpétué la blessure de l'apostasie.
Il n'y a aucune raison de croire aujourd'hui que les effets d'une négligence similaire seraient moins pernicieux.
Aujourd'hui, dans l'Église catholique, les victimes sont des personnes dont la vie a été directement ou indirectement gâchée par des abus sexuels ; faire d'eux des médiateurs de la réconciliation sera plus difficile aujourd'hui que dans l'Église primitive.
En effet les victimes avaient été persécutées par l'État et les personnes qui avaient besoin d'être réconciliées avec l'Église cherchaient leur soutien.
Aujourd’hui les victimes sont persécutées par des représentants de l'Église, et l'Église doit se réconcilier avec elles pour pouvoir se réconcilier avec elle-même.
Mettre au centre de la stratégie pastorale la réconciliation avec des personnes que vous avez blessées et souvent détruites, est un engagement courageux.
Étant donné que les dommages causés par les abus sexuels s’étendent au fil des générations, c’est un engagement à long terme qui est indispensable. L'histoire ancienne nous suggère rien de moins.
No shortcuts to reform after Church abuse crisis
A pattern of shameful actions that call into question the basis of the Church cuts very deep indeed and, if left unmet at that depth, can work its poison for centuries
Andrew Hamilton, Australia, April 3, 2019
Andrew Hamilton is consulting editor of Eureka Street.
The sentencing of Cardinal George Pell highlighted the dismay and soul-searching among Catholics at sex abuse and its devastation of the lives of victims and their families. It also brought home the depth of the crisis caused by clerical sex abuse in the Catholic Church.
Although it still challenges understanding, a historical parallel may help illuminate it.
Emperors Decius in 250 AD and Diocletian in 303 AD persecuted Christians in response to military reverses and perceived decline in Roman values.
They called for a return to traditional values and religious practices and saw Christians as a subversive and alien force, much as Muslim people are seen by some in Australia today.
They first targeted bishops and clergy, then all Christians, ordering them to hand over their sacred texts and vessels and publicly to offer sacrifice to the Roman gods.
Those who refused were fined, tortured or killed. Many Christians, including bishops and clergy, had fled or apostasised (denied their faith by publicly offering sacrifice, handing over the sacred books or buying certificates of compliance).
Where the persecution was systematically pursued, it deprived the church of strong leaders and burdened it with the shame of those who sacrificed. The disruption to congregations after the persecution can be imagined.
They included members who had been blinded, deafened or crippled while remaining faithful under torture (confessors), others grieving relatives who had been killed, some who had escaped notice, bishops and priests who had returned after flight to safer places and sought to resume their responsibilities, local clergy who had been ordained to serve in their place, and, significantly, many people who had publicly apostasised.
In a church which gloried in the courage of the martyrs as a sign of God's presence, apostasy was a corruption that tore at its heart.
The congregations were inevitably riven with anger, resentment, guilt, confusion, and above all disillusion at the gap revealed between their leaders' and members' proud profession of faith and their cowardly repudiation of it.
The standard accounts of the time held that the crisis was overcome by the cooperative work of strong bishops who had resolved disputes and preserved church unity.
They had dealt with the corruption of apostasy by establishing common rigorous rules for reconciling people who had betrayed the faith in more or less serious ways. They accomplished this through local and regional synods.
Although this reform of governance was a remarkable achievement, it ignored the depth at which apostasy had shaken the church and to which reconciliation of those who had fallen therefore needed to reach.
It also failed to deal with the suspicion that bishops themselves had been the primary channels of corruption in the church.
These weaknesses in the response explain partly why sectarian divisions continued to affect the churches in Rome, Egypt and Africa.
In most cases the bishops who led dissident groups demanded a much more restrictive approach to reconciliation and represented themselves as the church of the martyrs.
They also commonly accused their rival bishops of flight during persecution or of inheriting a tradition of selling out faith. The divisions were only intensified when the now Christian Emperors penalised the breakaway churches.
They could now boast that 'we are the persecuted who do not persecute'. They had inherited the mantle of the confessors.
This claim was significant because the traditional account minimised the crucial importance of the living victims of persecution. In the initial stages they were held in high honour, and people who had apostasised sought their patronage in order to return.
Their mediating role in reconciliation expressed their moral authority within the church and their favour with God. Their disfigurement by torture both symbolised what was expected of followers of Jesus and highlighted the disgrace in abandoning the faith.
The reforming bishops, however, criticised the arbitrariness and lack of uniformity in the confessors' judgments, and made of them eccentric and marginal figures in their church reform.
This neglect contributed to the continuing suspicion that the corruption of apostasy had not been addressed in sufficient depth and that the processes of reconciliation were superficial.
The parallels between these events and the Catholic Church today after sexual abuse are striking.
In both cases people who represented the church acted in a way that destroyed lives, destroyed trust in the church and God's presence in it, and broke relationships.
In both cases these actions left victims whose physical or mental scars were evident. And in each the institutions involved in the corrupting actions have sought to restore credibility and promote reconciliation by reform.
The experience of the early church suggests that a pattern of shameful actions that call into question the basis of the church cuts very deep indeed and, if left unmet at that depth, can work its poison for centuries.
It follows that the first challenge facing any attempted reform is to stay focused on the deep reality and corrupting effects of sexual abuse and to recognise the way in which it can poison even the attempted reform.
To believe that you can move on from it after 50 years or so undermined reform in the early church and will do so again if attempted. It is like the belief of people addicted to alcohol that they can move on from their addiction.
The second challenge posed by the experience of the early church is to recognise victims, to respect them as the keepers of conscience, and to involve them as the mediators of reconciliation.
To sideline them as unreliable observers who can be acknowledged verbally and ignored as persons, or to believe that they will fade away, opened the way for division in the early church and perpetuated the corruption of apostasy.
There is no reason to believe that the effects of similar neglect today would be less pernicious.
In the Catholic Church today the victims are people whose lives have been directly or indirectly marred by sexual abuse. To make them mediators of reconciliation is more difficult today than in the early Church.
Then the victims were those who had suffered persecution by the state, and those needing reconciliation with the Church sought them out.
Now the victims are those persecuted by representatives of the Church, and the Church that needs to be reconciled to them in order to be reconciled to itself.
To put at the centre of pastoral strategy reconciliation with people whom you have harmed, and will often want only to be shot of you, is a brave commitment.
Given that the harm done by sexual abuse has radiated out through generations, the commitment must be for the long term. History suggests that nothing less will do.
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Date de dernière mise à jour : 17/05/2019