Irlande - Amazonie : Le cadeau et le défi (première partie) - LCI Oct. 2019
Lire les signes des temps
Les 4 parties de cet article :
Amazonia the gift and the challenge 1ère partie
Amazonia the gift and the challenge 2ème partie
Amazonia the gift and the challenge 3ème partie
Amazonia the gift and the challenge 4ème partie
John O’Loughlin Kennedy
Irlande
Octobre 2019
John O'Loughlin Kennedy est un économiste à la retraite et un entrepreneur social. En 1968, il a fondé, avec son épouse Kay, l'organisation internationale de secours et de développement CONCERN WORLDWIDE, qui emploie actuellement environ 3 800 personnes autochtones pour des activités de développement dans 28 des pays les plus pauvres du monde.
1ère partie
L'Amazonie est une source majeure d'oxygène pour la vie physique sur la planète. Il est possible que très bientôt, nous remercions l’Amazonie d’avoir « refait le plein » spirituel.
L’Amazonie et François bousculent l’Eglise en convoquant un synode sur le thème « L’Amazonie : nouvelles voies pour l’Église et pour une écologie intégrale ».
Former des disciples et chercher de nouvelles voies impliqueront d'identifier les obstacles et de trouver les moyens de les contourner ou de les surmonter.
François enseigne que l'Église fait partie du monde créé et que la manière dont elle remplit sa mission doit être façonnée par l'environnement physique, social et culturel qu'elle rencontre.
Il a intégré la première loi de Barry Commoner : « Sur la conservation » (Barry Commoner, 1917-2012, est un biologiste américain majeur qui a établi 4 lois sur l’écologie, ndt) : Tout est connecté à tout. A la suite de Vatican II il lit les signes des temps et, plus concrètement, aime fonder ses décisions sur une évaluation impartiale de la situation et des opportunités.
L’enquête en prévision du synode sur l’Amazonie s’est poursuivie 18 mois selon la préférence de François pour le discernement plutôt que le dogmatisme et en s’appuyant sur son encyclique Laudato si ' et son exhortation apostolique Evangelii Gaudium.
Le document de travail du synode, Instrumentum Laboris, publié le 17 juin, est créatif. Il fait des propositions courageuses pour la politique de l'Église et pourrait avoir un impact énorme sur son avenir dans le monde.
Ce n'est pas seulement une réponse à la pénurie de clergé et à la « famine » eucharistique dans la région. C'est une reconnaissance que le culte du Créateur exige de prendre soin de sa création et souci désintéressé du bien-être physique et spirituel de tous ses enfants.
Cela implique une volonté d'adaptation aux réalités.
Ainsi, l’Église est appelée à s’opposer aux industries rapaces, minières et autres, ainsi qu’aux gouvernements répressifs indifférents aux dommages qu’ils causent à l’environnement et aux pauvres. (Oscar Romero n'est pas mort en vain !)
C’est aussi une reconnaissance extraordinaire du fait que la façon de faire de l’Église peut changer et doit changer si elle veut donner la priorité aux deux missions principales qu’elle a reçues du Christ : "De toutes les nations faites des disciples" (c.a.d. des hommes qui s’aiment) et "Faites ceci en mémoire de moi."
L'Instrumentum Laboris fait des propositions courageuses qui donnent clairement la priorité à ces missions, avant les règles, réglementations et traditions que les catholiques ont été amenés à croire immuables.
Il souligne la nécessité, lors de l'évangélisation de groupes autochtones divers, de s'adapter à leur situation pour greffer la foi dans la culture et le système social existants.
Il reconnaît que des groupes ont réussi à créer des communautés qui appartiennent à ceux et celles qui les constituent et où les fidèles peuvent s'exprimer librement sans censure, sans dogmatisme ou sans disciplines rituelles.
Il affirme humblement et courageusement que l'Église pourrait apprendre de certains de ces groupes, en particulier les pentecôtistes, et propose de travailler avec eux.
Contrairement aux synodes précédents, où il était interdit de discuter des questions importantes, l'Instrumentum Laboris de ce synode indique qu’il est prêt à affronter toute question de discipline ou toute doctrine qui entraverait la mission.
Les propositions du synode n'affectent aucune doctrine de foi mais envisagent des adaptations de certaines vieilles traditions pour tenir compte des différences de cultures, de conventions sociales et de modes de vie.
Elles promeuvent une manière d'être missionnaire plus souple que par le passé. Dans une Eglise qui se dit catholique, cela ne devrait pas alarmer. Les instructions du Christ à ses disciples peuvent être suivies à n'importe quelle époque et dans n’importe quel environnement mais cela exige une volonté d'adaptation.
Le concile de Trente a eu le courage de faire des changements en son temps, légiférant pour faire face à la situation à laquelle il était confronté. Les doctrines et les pratiques étaient largement contestées et l'Europe était inondée de prêtres dont beaucoup étaient très mal éduqués.
Aujourd'hui, l'Église est confrontée au même problème, mais la situation est inversée. Nous avons une pénurie de prêtres et des milliers d'hommes et de femmes hautement éduqués parmi les fidèles. Malheureusement l'héritage de Trente a tendance à être traité comme irréformable, voire infaillible.
Ainsi, la rigidité a fait du catholicisme une incongruité : un peuple de prêtres à court de prêtres !
L'Instrumentum Laboris ne manque pas de courage. Outre la réouverture de la discussion sur l'ordination des hommes mariés (qui a dominé la couverture médiatique), il rejette la "tradition monoculturelle, cléricaliste et coloniale qui cherche à s’imposer".
Au paragraphe 106, il définit le défi : « Les nouvelles voies de la pastorale en Amazonie nécessitent de relancer avec fidélité et audace la mission de l'Eglise sur le territoire et d'approfondir le processus d'inculturation et l'interculturalité ». Cela exige des propositions courageuses de l'Église en Amazonie, ce qui présuppose courage et passion, comme nous le demande le pape François. L'évangélisation en Amazonie est un test pour l'Église et pour la société.
Les nouvelles voies à explorer par l'Église dans la région pourraient donner la priorité aux missions de fond. Il y a plusieurs propositions courageuses parmi elles :
1. L'Église ne devrait pas être « en visite » mais dans une présence continue par l'intermédiaire de ministres locaux et participer à la structure communautaire et sociale.
2. Il est nécessaire de promouvoir les vocations autochtones parmi les hommes et les femmes. Cela nécessitera le respect de la place importante occupée par les femmes dans les communautés et les structures sociales autochtones.
3. Mentionner l'ordination des femmes aurait été trop risqué, mais une solution de contournement est proposée : envisager de nouvelles formes de ministère avec une adaptation appropriée des systèmes de sélection et de formation.
4. La tradition d'autorité temporelle qui existe dans de nombreuses sociétés autochtones devrait être respectée et utilisée. Cela peut impliquer plusieurs célébrants dans une communauté à tour de rôle. Cela permettrait de résister aux forces du cléricalisme.
5. Le lien permanent entre les pouvoirs de la gouvernance de l'Église dans tous les domaines (sacramentel, judiciaire, administratif) et le sacrement de l’ordre devraient être réexaminés. Cette proposition, pourtant modérée, présente un potentiel explosif.
6. Nous pouvons apprendre d'autres chrétiens. Nous devrions travailler ensemble, les rencontrer régulièrement, y compris avec leurs théologiens.
Il y a bien sûr beaucoup d'autres suggestions de discussion. Certaines des adaptations proposées permettraient aux fidèles de mettre leurs talents en œuvre de manière nouvelle et attractive.
Si elles sont approuvées pour la région amazonienne et qu'elles y réussissent, la pression pour les adopter et les adapter ailleurs suivra. La dernière phrase du § 106 citée ci-dessus le prévoit.
Cela aurait inévitablement un impact sur le pouvoir et le statut des prêtres ordonnés actuels et compliquerait la tâche de la Curie pour exercer son contrôle.
En résumé, l'Instrumentum Laboris reconnaît que faire des disciples exige un plus grand respect de l'écologie, en particulier des cultures périphériques, et une volonté d'adaptation des traditions pour mieux accomplir la mission.
Le besoin d'adaptation nécessitera un discernement clair de ce qui est essentiel à la foi et de ce qui n'est vénérable que pour son âge, l’habitude ou le confort.
C'est un moment de grande opportunité pour l'Église. Le synode aboutira-t-il ?
Les 4 parties de cet article :
Amazonia the gift and the challenge 1ère partie
Amazonia the gift and the challenge 2ème partie
Amazonia the gift and the challenge 3ème partie
Amazonia the gift and the challenge 4ème partie
Amazonia: The gift and the challenge (Part I)
Reading the signs of the times
October, 2019
This is the first of a four-part series before the Synod of Bishops' Oct. 6-27 special assembly on the Pan-Amazonian region that will discuss the theme "New Paths for the Church and for an Integral Ecology."
Amazonia is a major source of the oxygen that drives physical life on the planet. It is possible that very soon we will be thanking Amazonia for spiritual refueling as well.
Amazonia and Pope Francis have shaken the papacy out of its complacency and provoked a synod on the theme "Amazonia: new paths for the Church and for an integral ecology".
Assuming an unchanged goal, making disciples and new paths will mean identifying obstacles that slow our progress and finding ways around or through them.
Francis teaches that the Church is part of the created world and its ways of pursuing its mission should be shaped by the physical, social and cultural environment it encounters; the ecology.
He understands Barry Commoner's First Law of Conservation; Everything is connected to everything else. He also reads the signs of the times as recommended by Vatican II or, in more practical terms, likes to base decisions on an unprejudiced assessment of the situation and opportunities.
The survey in anticipation of the Synod on the Amazon has been going on for 18 months in ways facilitated by Francis' preference for discernment over dogmatism and by his environmental encyclical, Laudato si' and the Apostolic Exhortation, Evangelii Gaudium.
The working document of the Synod, Instrumentum Laboris, issued June 17, is creative. It makes courageous proposals for Church policy and could have an enormous impact on the future of the Church worldwide.
It is not just a response to the shortage of clergy and the Eucharistic famine in the area. It is a recognition that the worship of the Creator demands care for his creation and unselfish concern for the physical and spiritual well-being of all his children.
This implies a readiness to adapt to realities.
Thus, the Church is called to stand against rapacious extractive industries and other external enterprises or repressive governments that are indifferent to the damage they do to the environment and the poor. (Oscar Romero did not die in vain!)
It is also an extraordinary acknowledgement that the Church's way of doing things can change and should change if it is to give proper priority to the two principle mandates it has received from Christ: "Make disciples (i.e. people who love one another) of all the nations" and "Do this in commemoration of me."
The Instrumentum Laboris makes courageous proposals that clearly prioritize the mandates ahead of many rules, regulations and working traditions that Catholics have been led to believe are unchangeable.
It stresses the need, when evangelizing disparate indigenous groups, to adapt to the situation as it is and graft the faith into the existing culture and social system.
It acknowledges that "other groups" have been successful in building "communities" that somehow belong to the people who belong to them and "where the faithful can express themselves freely without censorship or dogmatism or ritual disciplines."
It humbly and bravely asserts that the Church could learn from some of these groups, particularly the Pentecostals, and proposes that it should work with them.
In contrast with earlier synods where discussion of some relevant and important issues was forbidden, the Instrumentum Laboris of this synod conveys a readiness to grapple with any discipline or doctrine that seems to be impeding the mission.
The synod proposals do not affect any credal doctrine, but they envision adaptations of some long-standing traditions to accommodate the variations in cultures, social conventions, and ways of life.
They promote a more adaptable way of being missionary than has been customary in the past. In a church that calls itself "Catholic" this should not cause alarm. Christ's instructions to his disciples can be followed in any age or environment; but this demands a readiness to adapt.
The Council of Trent had the courage to make remarkable changes in its time, legislating very effectively to meet the situation it faced. Doctrines and practices were being widely challenged and Europe was awash with priests, many of whom were very badly educated.
The Church today faces the same problem but the situation is reversed. We have an existential scarcity of priests and thousands of highly educated men and women among the faithful. Unfortunately, the legacy of Trent tends to be treated as irreformable, if not infallible.
Thus, rigidity has made an incongruity of Catholicism: a priestly people who are short of priests!
The Instrumentum Laboris is not lacking in courage. In addition to the reopening of discussion of the ordination of married men (which has dominated media coverage), it rejects the "monocultural, clericalist and colonial tradition that imposes itself". In §106 it lays down the challenge:
"The new paths for pastoral ministry in the Amazon require 'relaunching with fidelity and audacity' the mission of the Church (DAp. 11) in the territory and deepening the 'process of inculturation' (EG 126) and inter-culturality (cf. LS 63, 143, 146). This demands 'brave' proposals of the Church in the Amazon, which in turn presupposes courage and passion, as Pope Francis asks of us. Evangelization in the Amazon is a set of tests for the Church and for society".
The new pathways to be explored by the Church in the area could give appropriate priority to the basic mandates. There are several "brave" proposals among them:
- The Church should not be a visitor but an ongoing presence through local ministers and a participant in the community and social structure.
- It is necessary to promote indigenous vocations among men and women. This will require respect for the important position of women in indigenous communities and social structures.
- Mention of the ordination of women would have been too brave but a workaround is proposed: new forms of ministry should be considered, with appropriate adaptation of selection and training systems.
- The tradition of "rotational" authority to be found in many indigenous societies should be respected and utilised. This may imply several "celebrants" in a community taking turns. This would resist the importation/imposition of clericalism.
- The permanent link between powers of Church governance in all areas (sacramental, judicial, administrative) and the sacrament of Holy Order should be reconsidered. This mildly-presented proposal has explosive potential.
- We can learn from other Christians. We should work together, meet with them regularly, even with their theologians.
There are, of course, many more suggestions for discussion. Some of the proposed adaptations would allow members of the faithful to lend their talents to mission in new and exciting ways.
If they are approved for the Amazon region and prove successful there, pressure to adopt and adapt them elsewhere will follow. The last sentence of §106 quoted above anticipates this.
This would inevitably impact on the power and status of existing ordained priests and make it harder for the Curia to exercise its current level of micro-control.
In summary, the Instrumentum Laboris recognizes that making disciples demands greater respect for the ecology than until now, and particularly for peripheral cultures, and a readiness to adapt traditions to better accomplish the mandates.
The need for adaptations will call for clear discernment of what is essential to the faith and what is venerable only for its age, familiarity or comfort. It is a moment of great opportunity for the Church. Can the Synod deliver?
Dr John O'Loughlin Kennedy is a retired economist and serial social entrepreneur. In 1968, he and his wife, Kay, founded the international relief and development organization CONCERN WORLDWIDE, which now employs about 3,800 indigenous personnel on development work in 28 of the world's poorest countries.
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Date de dernière mise à jour : 20/10/2019